GRAND MÉCHANT STRESS Méditer pour surfer les vagues de stress

Mécanismes, effets du stress et bienfaits de la méditation

Mécanismes, effets du stress et bienfaits de la méditation

GRAND MECHANT STRESS : méditer pour surfer les vagues de stress

Le mot stress est utilisé en toute circonstance : à la moindre occasion le mot “stress” s’impose dans les conversations ordinaires. Certains d’entre nous font parfois mine de ne pas être stressés, mais la plupart du temps nous nous sentons “stressés”. Récemment, un médecin m’a d’ailleurs dit que 80% de ses consultations étaient liées au stress et à ses conséquences sur la santé.

Le stress c’est un syndrome d’adaptation. C’est une réaction générale de l’organisme pour s’adapter et survivre. Le corps décrète alors la mobilisation générale et déclenche la production immédiate d’hormones : l’adrénaline, l’endorphine, le cortisol et la noradrénaline. Le corps bénéficie d’un excédent d’énergie, de résistance à l’effort et à la douleur et il peut ainsi activer des réflexes rapides pour survivre et nous transformer en « super » nous. On pourra, ainsi, selon les situations, attaquer, fuir ou se figer face à un danger réel ou supposé tel.

Mais le stress modéré, ce n’est pas un problème en soi. Ponctuel et modéré, le stress optimise notre potentiel et nous nous réalisons dans la confiance. En revanche, c’est l’excès de stress et surtout la durée prolongée d’un état de stress qui sont nocifs à notre équilibre interne et donc à notre santé. Nos ressources énergétiques sont sur-consommées, nos organes sont sur-sollicités et nos défenses immunitaires sont diminuées…jusqu’à épuisement dans certains cas.

La bonne nouvelle c’est que la méditation de pleine conscience a fait la preuve de son efficacité pour percevoir les signaux de faible intensité que le corps émet quand le stimulus déclencheur ne provoque qu’un faible impact sur nous. Elle permet également de prendre conscience des générateurs internes comme des générateurs externes de stress pour nous. 

En fait, la plupart des générateurs des stress sont des excès ou des manques (excès de travail, manque de sommeil, excès de dépenses, manque de temps…). La méditation n’est pas un exercice de relaxation ou de bien-être mais permet d’observer ces états d’excès ou de manque. Elle vise à nous rendre davantage présent à ce qui est, et, donc à prendre conscience des mécanismes déclencheurs et aggravants de la tension en nous. Elle permet ainsi de sortir du mode « pilote automatique » et de prendre nos responsabilités au quotidien en veillant à mieux équilibrer nos moyens et nos attentes, nos ressources et nos objectifs.

En effet, à moins de nous retirer du monde et à moins de nous libérer de toutes nos pensées, il y aura toujours – autour de nous comme en nous – des stimuli générateurs de stress. Mais, grâce à la méditation de pleine conscience nous disposons d’un outil qui, par exemple, permet à cette partie du cerveau qu’on appelle l’amygdale de se réguler et de réduire la production de cortisol. La méditation fait également émerger notre attachement excessif. Gelong THUBTEN dans J’ai choisi le bonheur (Larousse, Paris 2020) dresse l’inventaire d’inspiration bouddhiste de ces agrippements qui nous éloignent de la paix et de la liberté intérieures : ne pas obtenir ce qu’on veut, obtenir ce qu’on ne veut pas, protéger ce qu’on a, perdre ce qu’on aime. La méditation régulière permet de nous reconnecter, selon lui, à notre potentiel de bonheur intérieur.

Nous nous installons donc tranquillement dans un endroit où nous ne serons pas dérangés pour expérimenter l’observation et la traversée d’une vague de stress.  A moins de nous retirer dans une grotte, au sommet d’une montagne ou dans un ermitage lointain, nous aurons toujours des stimuli c’est-à-dire des éléments – extérieurs comme intérieurs à nous-mêmes qui suscitent  ce qu’on appelle le stress à savoir une certaine tension de notre organisme pour s’adapter au mieux à la situation. 

De la même manière que les jeunes matelots n’apprennent pas à naviguer par gros temps, quand c’est la tempête ou un ouragan, de la même manière, c’est en commençant par surfer les ridules à la surface du lac émotionnel ou de toutes petites vagues de stress intérieur que nous ne pouvons espérer progressivement parvenir à surfer de bonnes grosses vagues de stress. 

Avec lucidité et humilité, nous savons à l’avance que les plus grosses vagues et les tsunamis de notre vie seront certainement dévastateurs ou en tout cas nous emporteront certainement à nos limites. Nous en sommes conscients et nous l’acceptons d’une certaine façon, car notre pratique modeste de la méditation n’a de toute façon pas l’ambition de nous transformer en ascète imperturbable.

Néanmoins avec de la détermination et de la persévérance, nous pouvons observer que dans certaines situations de la vie quotidienne, dont nous savons qu’elles nous stressent facilement, nous nous sentirons un tout petit peu moins impactés. Ou nous serons impactés mais peut-être un peu moins, un petit peu moins fort, un petit peu moins vite, un petit moins longtemps.

Grâce à l’immobilité et au silence relatif de la méditation, en tournant le regard vers l’intérieur, en nous retrouvons la position “neutre”. Nous ne dormons pas, nous ne sommes pas à l’arrêt. Nous regagnons en nous l’état de neutralité, l’état de l’apaisement relatif, de relative tranquillité. Nous laissons passer les pensées et les préoccupations. Même les émotions passent à l’arrière-plan. Autant que le contexte le permettra, nous nous maintenons dans la position neutre et serein. Et puis spontanément, sans réfléchir, nous revenons à un moment et à une situation récente que nous avons trouvée stressante, sans que ce soit ni grave ni important, même une toute petite poussée de stress fera l’affaire.

Essayons de visualiser la scène dans laquelle nous avons ressenti une tension en  nous, une bouffée de stress, une petite vague de stress. Où étions-nous ? Dans quelle  pièce ?  Dans quel lieu ? A quel moment de la journée ? de  la semaine ? Est-ce qu’il y avait d’autres personnes avec nous ? Comment étions-nous habillés ? Que faisions-nous ?Et sans que ce soit trop désagréable pour nous, essayons de nous rappeler exactement ce qui s’est passé comme si on se repassait sur l’écran intérieur cette petite séquence du film de la vie quotidienne. 

Essayons de ressentir à nouveau dans notre corps, la zone qui a ressenti en premier l’impact du stress. Physiologiquement, nous ressentons que les hormones se sont mobilisées et ont eu dans notre corps un impact physique même faible. 

Recherchons la première zone  à avoir été impactée. Est-ce que nous avons senti notre gorge se nouer ? Notre cœur se  mettre à accélérer ou à battre très fort ? Est-ce que nous avons senti notre plexus solaire se crisper ? Notre diaphragme se figer et nous plonger pour quelques instants dans une sorte d’apnée ? Est-ce que, dans notre ventre, les fonctions digestives ou d’évacuation ont pu être altérées, accélérées, ou ralenties ? Est-ce que nos mains sont devenues moites ou au contraire se sont-elles gelées ? Peut-être qu’elles se sont mises à trembler ? Est-ce que notre nuque est devenue raide? Est-ce que nos  trapèzes se sont contractés ? Notre dos s’est peut-être vouté et comme replié pour protéger la partie molle de notre corps ? Est-ce que nos tempes se sont resserrées l’une vers l’autre ? Est-ce que nos yeux se sont plissés et nos sourcils froncés ? Notre front est-il devenu soucieux tout d’un coup ? Peut-être que nous serrons les lèvres, que nous serrons les mâchoires, les dents sans nous en rendre compte ?

 Est-ce que nos genoux sont devenus mous? Nos jambes ont-elles chancelé ? Peut-être que nos pieds ont semblé se dérober et donner l’impression  d’avancer dans du coton ou au contraire de peser mille tonnes chacun ? 

Quelle est donc la zone de notre corps la première impactée par le signal de faible intensité ou quelles sont les deux ou trois zones atteintes en premier par les manifestations d’un stress même de faible intensité ?

Ce sont ces signaux de faible amplitude que nous nous entraînons à repérer et à observer en méditation. Mais puisque la méditation n’est pas une pratique de relaxation, nous ne luttons pas. Il ne s’agit pas de vouloir ne pas être stressé. Ni empêcher  ni lutter contre le stress. Tout au contraire, nous prenons en compte et nous observons comme un scientifique le fait qu’elle a été la zone impactée la première par la tension, même faible. 

Nous allons maintenant la prendre en compte et en tenir compte de cette zone du corps touchée par le stress, exactement comme on le ferait avec un petit oiseau blessé. Avec toute la douceur et la gentillesse dont on serait capable. D’abord on lui fait de la place et on le laisse respirer. 

On ne dit surtout pas des phrases de dénégation pour minimiser comme “ce n’est rien”, ou “ mais non, mais non, ce n’est pas arrivé”. Tout on contraire on dirait “ mais oui, mais oui, je vois que tu t’es fait mal, et que tu es étourdi” 

De la même manière nous nous entraînons à porter assistance à la zone de notre corps impactée  par le stress. Nous disons “oui, oui,  je vois que tu es là” ; “oui je vois que cette situation a tendu et a crispé cette partie du corps”. Je vais donc lui faire de la place pour qu’elle puisse respirer. J’essaye de continuer à respirer et j’essaye de respirer tout autour. C’est métaphorique bien sûr mais en même temps, toutes les parties de notre corps sont bel et bien oxygénées. 

Je peux ainsi respirer autour de la gorge crispée pour dégager de l’espace. Je peux respirer autour de l’espace du cœur qui tape ou autour du plexus solaire qui me  met en apnée ou autour des yeux crispés et des mâchoires tendues … 

Je respire de tout mon être et de tout mon corps pour éviter qu’une petite zone d’impact du stress ne s’étende davantage.  Je reste présent à cette alerte et je respire pour conserver un esprit clair. Plutôt que de céder à la panique totale et à la tétanie de la tête aux pieds, je prends la responsabilité de respirer et singulièrement de souffler pour relâcher toutes les parties du corps qui n’ont pas encore été impactées. 

L’intention c’est de pouvoir maintenir l’accès à mes ressources internes. C’est aussi de pouvoir demander de l’aide si besoin. C’est surtout de ne pas de ne pas provoquer de “suraccident” : en maintenant l’attention sur la respiration, j’évite d’en rajouter. 

En respirant, je me redresse et je retrouve ma dignité. Comme un surfeur, je retrouve une forme d’équilibre malgré la vague de stress. Je parviens à me rétablir sur le surf et à reprendre le cours de ma vie avec davantage de stabilité, de confiance, de sécurité intérieure. Et je continue surtout de bien souffler.

Finalement je reviens au présent et je me reconnecte doucement à la réalité présente. Je dispose maintenant d’une petite technique pour mieux accueillir et surfer la vague de stress suivante, et la suivante, et la suivante …