Porter son attention sur la respiration pour se sentir pleinement vivant. Respirer de tout notre être car tout notre être respire jusqu’à la moindre cellule.
Dans le langage courant, il y a de nombreuses expressions qui font référence au souffle. On peut « avoir le souffle court », « se sentir à bout de souffle » ou « avoir besoin d’un second souffle ». Parfois, nous croisons « une beauté à couper le souffle ». Mais seul un poète saura « saisir l’inspiration » pour le dire. Naturellement nous préférons « soupirer d’aise » que «rendre notre « dernier soupir ». Car le souffle, c’est la Vie, par essence. Nous pouvons nous priver de tout ou presque, mais, jamais bien longtemps de respirer.
La vie comme un souffle : « Souviens-toi que ma vie n’est qu’un souffle »
Livre de Job 7.7
Dans toutes les traditions spirituelles, donc, le thème de l’énergie vitale est central et immanquablement le souffle en vient à être associé à l’esprit divin. Ainsi, le terme hébreu rouah, rendu le plus souvent par « souffle » dans les traductions bibliques de la Genèse. Il correspond habituellement dans la Septante (traduction grecque de la Bible hébraïque) et le Nouveau Testament au terme grec pneuma, qui signifie d’abord « souffle » ou « vent », et qui est rendu par « esprit », c’est-à-dire un principe vital qui anime un être. De multiples façons, ces mots traduits par souffle ou esprit évoquent le mouvement et la vie, au sens propre ou métaphorique, comme résultant de l’action mystérieuse d’un principe supérieur et de son souffle, qui est perçu non seulement dans la vie ordinaire mais aussi dans les manifestations plus extraordinaires comme la force des héros ou l’habileté des artisans. (https://lire.la-bible.net/glossaire/esprit-souffle-2)
MÉDITER POUR REPRENDRE SON SOUFFLE
Ainsi, le thème du souffle et de la respiration sont dignes de notre attention et ont une importance considérable en méditation. En effet, dans les pratiques à médiation corporelle comme la méditation, la respiration est l’un des supports privilégiés. Les pratiques fondamentales visent en effet à se rendre présent d’instant en instant à notre souffle et à respirer en conscience. Le souffle est l’un des rares processus physiologiques sur lequel on peut agir comme c’est le cas dans le pranayama, les techniques respiratoires du yoga. Dans la tradition indienne, la vie dure un nombre donné de “souffles” : c’est pourquoi on s’entraîne à allonger les expirations et donc à allonger la durée de la vie. En tout cas, la respiration est particulièrement importante en méditation car notre souffle est constamment présent et en nous rendant présent à lui, nous nous entraînons à vivre pleinement.
Sur le site je partage une vidéo d’exercices respiratoires offerts par Anne Angelini et le support pour les élèves Aiguiser nos sensations corporelles. La chanson Namasté de Yannick Noah illustre bien cette pratique.
Nous nous installons dans un endroit tranquille et dans une position où nous pouvons nous tenir immobiles.
Nous adoptons, dans la mesure du possible, dans une position relativement redressée avec cette intention de faciliter la respiration mais sans effort ni sans volonté excessive.
Simplement nous nous préparons à diriger notre attention vers la respiration.
Dans la méditation de pleine présence, il s’agit simplement de se rendre présent et de diriger son attention, de manière soutenue, dans le temps, mais, sans rien modifier, sans rien changer, sans rien diriger, sans rien attendre.
Peut-être que nous observerons qu’une qualité d’attention plus grande améliore la respiration mais si ce n’était pas le cas, c’est sans importance. Car la méditation de pleine présence ne vise pas la performance et ne prétend à aucun but : il s’agit juste d’être présent à ce qui est, d’accorder son attention, d’orienter sa conscience vers un support. Ici nous prenons comme support, la respiration. Car c’est un support de méditation particulièrement approprié, particulièrement recommandé, particulièrement efficient puisqu’il est toujours avec nous et toujours disponible.
Nous n’avons pas besoin de penser à l’emporter ni de vérifier si on l’a pris comme des clés, un parapluie ou notre téléphone.
Notre souffle est toujours là : du début de notre vie jusqu’à la fin de celle-ci. C’est d’ailleurs le souffle lui-même qui détermine précisément l’entièreté de notre vie, du début à la fin.
Il y a comme un petit renversement dialectique : on peut considérer le souffle comme vital pour nous et donc par réciproque, quand nous voulons avoir la sensation d’être vivant, nous revenons à notre souffle. Nous revenons au ressenti de notre respiration, au ressenti de l’air frais à l’entrée de nos narines. Nous pouvons jouer à inspirer comme si c’était la première fois, à redécouvrir à chaque inspiration, le ressenti de l’air frais au contact de nos narines sans rien chercher à maîtriser mais juste à observer et juste à ressentir. Puis, nous pouvons suivre le trajet de l’air en nous, dans le nez, dans la gorge. Ce sont des ressentis subtiles car l’air entrant dans nos narines se réchauffe à notre contact et progressivement le différentiel thermique s’estompe.
Ensuite, nous pouvons sentir quelque part dans la clavicule le début du gonflement des poumons.La cage thoracique se soulève légèrement à l’inspiration, dans le poumon gauche, dans le poumon droit qui est légèrement plus vaste du fait qu’il n’y a pas le cœur. D’ordinaire nous ne sentons pas nos poumons et donc nous n’y prêtons pas attention. Il faut attendre la toux par exemple pour y prêter attention. Comme c’est agréable pourtant de pouvoir respirer librement, tranquillement sans effort et sans y penser. Quelle chance que – par automatisme miraculeux – la cage thoracique se soulève… de jour comme de nuit … quelles que soient nos activités. Essayons aussi de ressentir le gonflement de nos poumons dans notre dos, plutôt à l’arrière en direction de la colonne vertébrale. Comme un massage de l’intérieur.
Et, subtilement, à force d’entraînement, nous ressentons peut-être le diaphragme. Le diaphragme, ce gros muscle à la base des poumons, serait comme une pompe ou comme un soufflet plus exactement pour les poumons. Il se contracte et remonte pour vider les poumons et chasser l’air : c’est l’expiration. Il se détend, se déploie et s’abaisse à l’inspiration. Naturellement en cas de crispation ce muscle a plus de mal à s’abaisser pour faire son office et il n’est pas rare que, dans la journée et au fil des vies, nous ressentions une gêne à l’inspiration et parfois même une sensation proche de l’apnée. Observons ce petit massage interne engendré par le diaphragme, sans rien changer, sans rien contrôler. Essayons de le sentir vers le plexus solaire et puis progressivement dans toute son ampleur dans nos flancs et dans le dos. Nous observons peut-être aussi que notre abdomen se soulève à l’inspiration, comme le diaphragme s’abaisse et appuie sur nos viscères ce qui fait gonfler l’abdomen. Il n’y a pas de poumon dans le ventre mais le ventre se gonfle à l’inspiration et se baisse à l’expiration pour aider à chasser l’air des poumons.
Pour les plus réfractaires d’entre nous à la méditation, pour les jeunes enfants, pour les élèves dans l’adolescence, observer le va et vient du ventre est une pratique ludique et facile. Et c’est bienfaisant car dans le ventre, il n’y a pas de pensées, pas de contrariété, tout est calme.
Se recentrer sur le va et vient lié à la respiration dans le ventre et dans la cage thoracique c’est à la fois facile et efficace : même dans l’immobilité la respiration produit du mouvement et un va-et-vient qui sert de support à l’attention…l’attention à la respiration re – synchronise le mental et le corps. Nous nous sentons davantage unifiés car le corps, l’esprit, le souffle sont réunis. Nous observons qu’à l’expiration l’abdomen s’abaisse. Le diaphragme monte, se contracte pour chasser l’air du poumon. Naturellement si nous sommes tendus, contrariés, stressés, le diaphragme dans une certaine raideur a du mal à faire son office et il a du mal à pulser de l’air. Nous gardons de l’air déjà respiré, de l’air plein de CO2 dans nos poumons. Nous ne respirons pas bien parce que nous n’avons pas vidé nos poumons. Dans la tradition orientale respirer c’est expirer. Portons toute notre attention sur l’expiration, l’abdomen se baisse, le diaphragme remonte, les poumons se vident, l’air tiède passe par la gorge et sort par les narines. Toute notre attention suit le trajet de l’air depuis l’abdomen, diaphragme, poumon, gorge, narine.
A chaque expiration paradoxalement il s’agit de se relâcher pour que le diaphragme puisse bien remonter. Ensuite viennent ces quelques secondes ou ces tout petits instants entre la fin de l’expiration et une nouvelle inspiration : il y a comme une bascule qui se fait en mode automatique tout à fait spontanément.
“Souviens-toi que ma vie n’est qu’un souffle”, souviens-toi que la vie c’est déjà souffler.
Observer et souffler, lâcher “l’air déjà respiré”, lâcher le “déjà-vu”, lâcher le “déjà-fait”, lâcher les regrets, lâcher les colères, les remous, les contrariétés, tout ce qui nous pèse, tout ce qui nous encombre, souffler, juste souffler, rien que souffler.
Méditer pour reprendre son souffle, c’est surtout exhaler un air déjà utilisé et désormais inutile. Nous méditons pour laisser aller le souffle, pour le laisser s’en aller et pour le renouveler. Nous pourrons ensuite inspirer un air nouveau, frais, vivifiant, énergisant. Ainsi nous nous laissons respirer de tout notre être car tout notre être respire jusqu’à la moindre cellule
Inspirer de tout son être de la tête aux pieds, expirer de tout son être des pieds à la tête.
“Souviens toi que ma vie n’est qu’un souffle”, souvenons-nous de méditer pour reprendre notre souffle.

Dans les vidéos, je partage une vidéo d’exercices respiratoires offerts par Anne Angelini. Il y a, dans Avec les ados au lycée, le support élève et la fiche-professeur Aiguiser nos sensations corporelles. Dans la rubrique Chanson je dispose aussi le titre Namasté de Yannick Noah ainsi que les paroles.