Le cerveau est ce moulin à pensées dont la fonction est de produire des pensées en continu. Les pensées sont comme des nuages dans la conscience. Il suffit d’observer et de les laisser passer sans alimenter ni les repousser pour retrouver sa liberté et sa sérénité.

Méditer constitue un véritable défi pour bon nombre d’entre nous qui sommes habitués à “mouliner des pensées”, à “turbiner” ou à “ruminer” en continue. Car nous disposons d’un moulin qui est au fond “moulin à pensées”. Longtemps, nous avons cru être les seuls à fonctionner ainsi, à être constamment envahis par ce remplissage incessant de pensées en tout genre. Ce bavardage intérieur – de soi à soi-même – et ces associations d’idées à l’infini et dans tous les sens ont pu nous apparaître comme une petite tare personnelle. Or, c’est “pareil pour tout le monde” comme on dit. C’est même absolument normal en fait. Quel soulagement de découvrir enfin que, de la même manière que le coeur pulse le sang et que les poumons brassent l’air, le cerveau produit automatiquement et en continue – aussi bien le jour que la nuit – des pensées…. des pensées …. encore des pensées…! Donc c’est impossible de ne pas penser. Et par conséquent, la méditation ne vise pas du tout à “ne penser à rien” ni à “faire le vide en soi”.
La pratique de la pleine présence consiste plutôt à porter un nouvel éclairage sur nos pensées. Méditer permet essentiellement d’observer nos pensées le plus objectivement possible. L’intention c’est de reconnaître les pensées brillantes, les pensées créatives et justes mais aussi de distinguer les pensées sombres, destructrices voire fausses. Nous observons également que nos pensées sont le plus souvent dans le passé ou dans le futur et que les pensées ont bien du mal à rester dans le présent. Enfin nous reconnaissons assez vite que nombre de nos pensées sont des opinions, des jugements voire des critiques et qu’elles sont – de ce fait – tout à fait personnelles et subjectives. Or, les pensées aiment avoir raison et sont capables d’argumenter à l’infini pour défendre leurs positions.
Pourtant les pensées ne sont que des pensées. Les pensées ne sont pas la réalité. Elles sont la plupart du temps une interprétation de la réalité ou une projection de nos états internes sur la réalité. Méditer permet de prendre le temps de bien repérer cette distinction entre la “réalité objective” si tant est qu’elle se laisse approcher et ce que “je suis en train de penser” sur la réalité et qui m’appartient. Le problème vient de ce que les pensées, produites par le néocortex, auxquelles on accorde trop d’importance ou qui se fixent en nous, durablement, alimentent des émotions qui ont leur siège dans le cerveau limbique. Et comme elles sont très rapides et très nombreuses, les pensées en viennent à nous faire ressentir beaucoup d’émotions dans le corps et dépenser beaucoup d’énergie psychique et physique. Les pensées négatives en particulier peuvent nous maintenir durablement dans des ressentis négatifs et altérer notre équilibre émotionnel et notre santé mentale et physique.
Heureusement, la méditation de pleine conscience permet de s’entraîner à observer ses pensées pour se libérer de leur emprise. La position de témoin que l’on adopte depuis l’espace de la conscience agit comme un effaceur à pensées qui annihile leur pouvoir de nuisance. De plus, avec un peu d’entraînement, méditer permet de choisir ses pensées, de renforcer les pensées ressources et d’éviter de nourrir les pensées négatives pour se sentir libre et tranquille. Il ne s’agit pas d’auto-persuasion ni de vivre dans l’illusion : il demeure difficile de toute façon de s’empêcher de penser à un souci important ou une grave préoccupation. Mais il s’agit de s’exercer à observer les pensées de ce type qui nous traversent sans les alimenter et sans les repousser pour les laisser passer sans les fixer en nous et à recommencer autant de fois que nécessaire. Depuis Sigmund Freud, on sait que l’inconscient ne prend pas en compte les négations. Il est donc vain de vouloir “ne pas penser à ceci ou cela”. Et de toute façon, il est inutile de vouloir autre chose que ce qui se présente à nous, y compris sous la forme d’une pensée inquiétante. Mais, grâce à la méditation, nous regagnons un peu de temps et d’espace à l’intérieur de nous-mêmes pour décider librement et consciemment de l’importance qu’on accorde à telle ou telle pensée.
Comme les Grimlins, qui sont des créatures adorables en journée, mais qui deviennent monstrueuses, si on les alimente ou si on les mouille après minuit, nos pensées sont pour la plupart inoffensives si nous les laissons passer sans les alimenter. Si nous les alimentons à l’infini, au contraire, elles peuvent prendre totalement possession de notre esprit et nous priver de notre libre-arbitre. Les neurosciences attestent tout à fait les “autoroutes” neuronales dont il sera très difficile de sortir après les avoir longuement consolidées par des raisonnements répétés régulièrement. On se méfiera en particulier des pensées automatiques de dévalorisation de soi qui, entretenues et alimentées régulièrement, se révèlent tout à fait destructrices pour l’estime de soi car elles nous maintiennent dans un état de peur, elles nous font nous sentir mal et nous rendent tristes et amers. Méditer permet de repérer de mieux en mieux les pensées générées par le “critique intérieur” et permet, depuis l’espace de la conscience, de choisir d’éteindre “radio critique” de plus en plus rapidement. Méditer permet de revenir au corps, au souffle et à la conscience qu’une pensée n’est qu’une pensée. Les pensées sont pour la conscience comme des nuages qui vont et viennent dans le ciel sans jamais ni le remplir totalement ni l’altérer durablement ni le dévaster profondément. La conscience demeure infinie, inaltérable et imperturbable. Méditer c’est revenir dans l’espace de la conscience pour se libérer des pensées et retrouver la sérénité qui est déjà et toujours là en nous.
Les yeux fermés, nous nous immobilisons et nous nous rendons disponibles, dans un face-à- face authentique, de soi à soi-même et nous expérimentons la découverte, la rencontre voire la confrontation avec nos pensées. Observer ce flux incessant de nos pensées, ce n’est pas toujours confortable. L’intention de la méditation n’est pas de procurer un moment agréable, ce n’est même pas la détente ; c’est juste se rendre disponible à ce qui est, et en particulier à ce qui se joue en nous, parfois à notre insu, pour retrouver de l’espace intérieur et une forme de sérénité profonde.
A tout moment cette session peut être reprise et recommencée : on peut se rassurer car au fond c’est sans danger. On est bien habitué à ce petit bavardage intérieur. Notre ressassement et notre rumination sont tout le temps là, et finalement, on cohabite avec depuis toujours.
Commençons par noter tout ce qui ressemble à des commentaires… ou à des résistances… des interrogations. Quand nous cessons toute activité, le cerveau fonctionne en mode par défaut. L’imagerie médicale observe tout à fait bien ce fonctionnement du cerveau dans ce mode par défaut. Toutes ces pensées autogénérées alors même que nous souhaiterions revenir à notre respiration et au ressenti corporel par exemple, c’est le mode “pilote automatique” ou le “mode par défaut” de notre cerveau.
Il y a un autre mode qui est le “mode attentif” celui que nous déployons quand nous sommes dans une activité, quand nous travaillons, quand nous nous livrons à nos tâches quotidiennes. Nous portons notre attention sur un objet déterminé et le “mode par défaut” passe au second plan. Dans la méditation, nous essayons de porter notre attention sur la respiration notamment, car c’est un objet mobile, automatique lui aussi, qui ne demande pas d’effort et qui est toujours présent pour nous. L’exercice consistera à maintenir son attention sur la respiration et à laisser passer les pensées générées par le “mode par défaut” du cerveau sur le “pilote automatique”.
L’espace de la conscience est assez vaste pour permettre ces deux attentions, une attention focalisée dans la durée sur le souffle ou sur les ressentis corporels ou sur la flamme d’une bougie ou sur tout autre chose et puis laisser passer les pensées.
On peut imaginer que les pensées sont comme des wagons, les wagons d’un immense TGV lancés à pleine vitesse et d’une longueur infinie : les wagons se succèdent aux wagons. Il peut y avoir des pensées agréables, des pensées très désagréables, des gros wagons bien lourds, bien plombés, il y a des wagons remplies de matières explosives si ça se trouve… Et nous nous imaginons être comme une vache dans le pré, totalement indifférents au passage de ce TGV des pensées.
Nous ne résistons pas, nous ne luttons pas contre ce train des pensées, nous ne sommes pas un super héros : nous n’avons pas les pouvoirs de stopper ce train des pensées puisque c’est le mode normal du cerveau par défaut. Si nous essayons de lutter, alors, nous nous mettons en tension interne et surtout nous risquons de fixer, de maintenir, de retenir telle ou telle pensée. C’est ce qui génère des ruminations, des ressassements, des “autoroutes de neurones” dans lesquelles nous serons ensuite prisonniers.
Nous revenons dans cette posture de l’observateur depuis l’espace de la conscience. Nous n’alimentons pas le train de la pensée, nous ne rajoutons pas des wagons aux wagons, nous ne remplissons pas davantage nos wagons de pensées. C’est le train des pensées constitué de nombreux wagons de pensées : nous ne les alimentons pas, nous ne les rechargeons pas, nous les laissons passer….
Et nous revenons dans le pré, si nous aimons l’image de la vache. Nous revenons à l’attention portée au souffle et aux ressentis corporels. Et progressivement, nous prenons appui sur cet exercice dans nos activités quotidiennes : si nous marchons, nous portons notre attention à la marche…. si nous coupons des légumes, nous coupons des légumes … si nous nous brossons les dents, nous nous brossons les dents …. en laissant tranquillement filer le train de la pensée.
Méditer n’est rien d’autre que porter son attention, d’instant en instant, volontairement, sur un objet sans enjeu comme la respiration ou comme la tâche entreprise, juste ici, juste maintenant.
Demeurer dans l’espace de la conscience et ne pas se laisser embarquer par le train des pensées sans importance. Il y en a des dizaines de milliers peut-être plus de 65 OOO pensées par jour. Plus de 65 OOO wagons vont défiler et on les laissera tranquillement filer avec le train de la pensée.
Bien sûr, bien sûr on se laissera embarquer parfois…Bien sûr pendant plusieurs minutes on se laissera embarquer par le train des pensées. Mais, nous prenons de plus en plus facilement conscience. Et comme un observateur neutre et détaché, nous en prenons note : « ah tiens, je suis en train de penser, …. ah j’étais en train de penser que…., ah je suis encore en train de penser ça….».
Avec curiosité, avec gentillesse et bienveillance pour nous-même, comme le ferait un observateur météorologique, un journaliste ou un laborantin, nous notons que nous étions “en train de partir” avec le “train des pensées”. Nous notons que nous étions dans tel wagon de pensée : petit à petit nous pourrons même nommer les wagons. Il y a le wagon “ceci”, il y a le wagon “cela” …On observera que, finalement, on a dix bons gros wagons. Toujours cette même douzaine de wagons : ce sont toujours les mêmes à revenir en lien avec notre histoire personnelle, nos habitudes attentionnelles et l’actualité qui nous préoccupe. Nous pourrons repérer ces “wagons de pensées” qui s’imposent parfois à nous malgré nous, même dans les bons moments, même la nuit, même en vacances.
L’entraînement méditatif consiste à revenir 65OOO fois par jour, tous les jours, jour après jour à la respiration et au ressenti corporel. Revenir à l’instant présent qui est celui de la vie en train de se vivre. Pour vivre pleinement, débarquons du train de la pensée aussi souvent que nécessaire pour être totalement à ce qu’on fait… totalement présent à ce qui se donne à vivre.
Je suis en train de méditer, je suis en train de respirer, je suis en train de ressentir le contact de mon corps avec le support, avec les vêtements, avec l’air ambiant. Je ne monte pas dans le train des pensées car les pensées ne sont que des pensées. Or, les pensées ne sont pas la réalité. Si je reste trop dans le train de la pensée, je verrai ma vie s’écouler, défiler comme un paysage et au terminus, je risque d’avoir beaucoup de regrets.
Donc je m’entraîne à interrompre les enchaînements de pensées et les arborescences mentales. Je m’entraîne pour revenir dans la vie et pour revenir au souffle. Je suis dans cet inspire, je suis dans cet expire, je prends refuge dans l’instant présent. Je suis chez moi dans l’instant présent et je me rends disponible pour la vie en moi et la vie autour de moi, juste ici et juste.
Méditer c’est se maintenir, avec détermination, dans l’espace de la conscience, vaste et infini, comme le ciel bleu, capable de contenir tous les nuages de la pensée, sans en être dérangé, et, sans y accorder trop d’attention. Comme le souffle, la conscience est toujours là quelque soit les hauts et les bas de l’existence.
Ressentir l’infini de la conscience en soi apporte beaucoup de stabilité, de paix intérieure et de sérénité.
Image : tribut à https://pixabay.com/fr/photos/t%C3%AAte-femme-personne-personnes-2379687/

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